Alban Berg , la Suite Lyrique
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Table des matières


1. Préface

2. Notes utiles

3. Approche de l'oeuvre

4. Situation historique de l'oeuvre. Vienne

Vienne dans les années 1900
Humour et pessimisme
Karl Kraus
Peter Altenberg
Le scandale du concert de 1913
Gustav Mahler
Alexander von Zemlinsky
Alban Berg et la tradition viennoise
L'apport intellectuel juif
Sigmund Freud
L'expressionisme
Richard Strauss
Vienne, démographie et urbanisme
Adolf Loos
La Sécession, Gustav Klimt
Point d'orgue. Henrik Ibsen

5.   Le wagnérisme

L'accueil viennois
L'Ecole de Vienne et Wagner, Brahms
La dramaturgie
Le Leitmotiv
Message socio-politique

6.   L'école viennoise. Schönberg le maître, ouvreur de chemins nouveaux

La rencontre avec Alban Berg
Apprentissage
Naissance de la série
L'idéal de Schönberg
Point d'orgue. Anton Webern


7.   Les principes du dodécaphonisme et son idéologie

Les fondements
Les quatre opérations
La règle de non-répétition
La permutation
Les intervalles
Émergence historique du principe sériel
Le contexte socio-politique
Social-démocratie
et nivellement de la hiérarchie
Atonalité et lyrisme intérieur
Point d'orgue. Kasimir Malévitch


8.   La partition secrète, le cryptogramme et son enracinement historique

Prologue au récit sous-jacent
Le secret
La recherche des musicologues
Le réseau crypté

8.1 Les annotations cachées
Vers un idéal d'artiste
Allegretto gioviale
Andante amoroso
Allegro misterioso
Adagio appassionato
Presto delirando
Largo desolato
8.2 La numérologie
Vie secrète
Encore des nombres
Ésotérisme
Les indications métronomiques de la Suite lyrique
Les proportions chiffrées de la Suite
8.3 Enracinement historique du cryptage
Le précédent de Schumann
Une sensibilité commune
La franc-maçonnerie de Mozart
La Flûte enchantée
Retour à Bach
Plus loin... Guillaume Dufay
Cryptage par graphie des notes
Berg et tradition

9. La citation en tant que référant et signifiant

La caution surréaliste
Le "pacte" de la citation

9.1 Wagner

Consanguinité avec Tristan
Genèse d'un destin
La trame wagnérienne

9.2 Zemlinsky

Symphonie lyrique opus 18
Du bist mein Eigen, mein Eigen

9.3 Les clé de l'Adagio appassionato

L'Adagio, coeur de la Suite

10. Étude formelle des six mouvements

La suite, bref historique de la forme
Suite lyrique, généralités
Le Storm-Lied II et la Suite lyrique

10.1 Aspect formel de la Suite lyrique

Variations de la métrique
Types d'écriture

10.2 Allegretto gioviale

Considérations historiques, forme intégrée, Liszt
Structure formelle de l'Allegretto gioviale
Les deux thèmes de l'Allegretto gioviale

10.3 Andante amoroso

Un accent tchèque...
Le drame affleure
Première séquence de Hanna
Seconde séquence de Hanna
Séquences de Munzo et Dorothea
Troisième séquence de Hanna

10.4 Allegro misterioso

Les timbres
Structure formelle
La rétrogradation (palindrome)
Structure interne de la reprise du scherzo
Présence vertigineuse de l'anagramme

10.5 Adagio appassionato

Les contours s'estompent
Structure interne de l'Adagio appassionato

10.6 Presto delirando

Forme générale
Les scherzi
Proportions chiffrées
Remarques générales
Les deux trios "Tenebroso"

10.7 Largo desolato

De Profundis Clamavi
Un chant liturgique luthérien
Un texte silencieux
Texte et musique
Les Adieux
Une forme en arche
Un éternel retour

11. Série et atonalité. Le contrepoint.

La série de la Suite lyrique
La série de Klein
Les diverses transpositions de la série de Klein dans la Suite

11.1 Série de Klein, traitement sériel dans la Suite lyrique

11.1.1 Allegretto gioviale, Mise en place du réseau
11.1.2 Andante amoroso, les liens se tissent
Munzo et le deuxième thème de l'Allegretto
Autre présence sérielle
Sur les pas de Debussy...
11.1.3 Allegro misterioso, série et anagramme
Série en "divisi"
Des gammes, toujours des gammes...
Trio estatico
Atonalité libre et série
11.1.4 Adagio appassionato, série et citation de Zemlinsky
11.1.5 Presto delirando,  série Klein et série Zemlinsky
Trio 1, Tenebroso
Trio 2, Di nuovo tenebroso
Les scherzi tramés par deux séries
Combinaisons des séries
"Tenebroso" et "Zemlinsky"
11.1.6 Largo desolato, le fil n'est pas rompu...

11.2 Le contrepoint

Imitations, strettes, diminutions et augmentations
La polyphonie
11.2.1 L'ostinato
Ostinato, Allegro misterioso
Ostinato, Andante amoroso
Ostinato, Presto delirando

11.3 Étude du rythme de trois extraits

1.Le scherzo de l'Allegro misterioso
2.La coda du Presto delirando
3.Le début du Largo desolato


12. "Alles ist erlaubt." La recherche de continuité historique dans l'écriture et la sémantique

De l'Art sans élitisme
Les "Wiener Werkstätte"
Alban Berg, viennois de coeur et d'esprit
Un langage sans rupture
Lyrisme et vocalité
Digression vers Webern et Debussy
Tessiture des voix et expression
Les intentions figuralistes

13. Le besoin de sens, de signes. Berg et le non-dit, le caché devenant procédé d'écriture et vecteur d'unité

14. L'harmonie. Verticalité, thématisation des intervalles

Le parti pris d'Alban Berg
Horizontalité et verticalité
Série de Klein et harmonie tonale
Liberté du langage harmonique

14.1 Thématisation des intervalles

La quinte juste
Symbolique de la quinte dans la Suite lyrique
La quarte juste
Septième mineure et septième majeure
L'octave
La tierce majeure

15. Ambiguïté de la démarche de composition et dégénérescence, de l'humain à l'individuation

16. Berg et les micro-structures, la technique des restes ou l'unité par extension et fragmentation

La technique des restes
Andante amoroso
Adagio appassionato
Presto delirando

17. La variation et le développement

Variation et développement dans les mouvements de la Suite

17.1 Réexposition de l'Allegretto gioviale

Le Pont (Exposition et Réexposition)
La coda de l'Allegretto gioviale
Autres modifications

18. La transgression et le dépassement de soi

19. Conclusion en forme d'inconnue

20. Glossaire

Le jeu des cordes

21. Index des exemples musicaux

22. Index des illustrations

Illustrations noir et blanc
Illustrations couleurs

23. Index des noms


25. Bibliographie




Prag, 11. November 1925
Abends im Bett


Mein Pferscherl ! Um Dir nur kurz berichten. Am Bahnhof in Prag war Herbert Fuchs. Riesig lieb, mich gleich für die Heimreise von Berlin nach Wien wieder einladen. In seinem Haus engelangt, schickte ich ihn, es war 1/2 3 Uhr, schlafen, ich begab mich in mein Zimmer und ruhte auch aus. Um 1/2 5 Uhr trafen wir uns alle beim Kaffee (ja, Herbert sagte mir auch, dass ein Mittagessen bereitstehe, das ich aber refüsierte, da ich kolossal satt war von dem, was Du mir mitgegeben hattest). Also um 1/2 5 Uhr erschien auch Moppinka samt den Kindern. Der Bub macht sich sehr, das Mäderl ist aber sehr schwächlich, sieht auch leidend aus, also nicht einmal hübsch. Aber trotzdem so lieb, dass es Dir sicher gefiehle. Überhaupt : wenn Du einmal die Leute kennenlernen wirst, werden sie Dir nicht darum hab'ich die Leute gern. Und das wird Dir geradeso gehen.

Du weisst, Golderl, warum ich das so ausführlich erzählte : nicht aus Begeisterung (meine Gedanken sind ja längst in Berlin !), sondern um Dich wegen Moppinka zu beruhigen.

Nach der Jause spielten wir fast die ganze Zeit mit den Kindern. Dann Nachtmahl : Hummer-Eier, Rebhühner mit Erdäpfel und Kompott, Käs, Obst. - Und darauf ein unbeschreiblicher Hennessy ! Diese beiden (Wein und Cognac) sin schuld, dass ich fast schon schlafe. Es ist 1/2 11 Uhr. Gutnacht ! Morgen ein paar Zeilen von Berlin ! Meinem Schnudoa und Kumpan !

(Courrier adressé par Berg à son épouse Hélène. Moppinka est le surnom donné par Berg à Hanna Fuchs-Robettin, née Werfel, l'épouse de l'industriel praguois Herbert Fuchs. In Alban Berg, Briefe an seine Frau, p. 540. Albert Langen-Georg Müller Verlag. München. 1965.)




3. Approche de l'oeuvre


Ma première écoute de la Suite Lyrique d'Alban Berg remonte au temps de l'adolescence. A cette époque, je découvrais bouleversé les compositions de l'école viennoise : Pierrot Lunaire, les Nuits Transfigurées ou divers Lieder de Schönberg et Les Sieben Frühe Lieder, Wozzeck, Lulu, et bien sûr la Suite Lyrique d'Alban Berg. Webern est venu un peu plus tard, avec les Six bagatelles opus 9 et les Cantates...

A cet âge, ma complicité avec ces compositeurs était beaucoup plus forte qu'avec Mozart ou Bach. Cela peut se comprendre, sans nécessairement s'expliquer... La Suite Lyrique développait un discours qui m'était immédiat. Et cette connivence, vécue comme une révélation, ne prenait pas son sens dans une étude particulière de l'écriture atonale, mais tout simplement, de façon première, dans l'écho de mon univers intérieur.

Certes, Munch m'avait ouvert les voies de cette expression exacerbée et folle des passions humaines, de ses souffrances, tout comme l'esthétique de Klimt, dramatiquement pessimiste, en fait... Le Voyage au bout de la nuit (Louis-Ferdinand Céline) a fait le reste, ou Kafka, ou Rimbaud, ou Baudelaire, ou peut-être, Breton, Desnos, l'écriture automatique, et nous voilà tout près de Freud, plongé dans un temps ; un temps de vie parallèle au temps de l'histoire humaine. Et qui pourrait oublier les images de Schiele...

L'impression nette de marcher au pas de ces briseurs involontaires d'un monde ordonné, hiérarchisé. Mais plus que cela, au sortir de l'enfance... car enfin, il m'était donné d'entrer dans une musique de l'inconscient. Entendu par là, une musique régie par les manifestations de l'inconscient, ses troubles, ses cauchemars, ses espoirs, son insondable mystère. Un inconscient traduit avec puissance dans les résonances atonales des cordes de la Suite Lyrique.

Une imagination au pouvoir, et au refus de faire allégeance à la tonalité formaliste, décatie, frein à l'expression de ce désordre intérieur, au feu des passions. L'être abstrait se devait de quitter la tonalité et se muer dans le non-visible, le non-incarné, à la manière des cubistes, des déformeurs de mondes.

On oublie si souvent que l'abstraction est bien née tout à la fois d'un besoin absolu de liberté, de lyrisme, et d'une recherche de sobriété, d'essentiel, de dépouillement. Profession de foi du carré blanc sur fond blanc de Malevitch, Kandinsky, "du spirituel dans l'art", Tatline et le constructivisme,... Cela ne signifiant pas qu'il y a rupture avec l'esprit romantique, bien au contraire, car les thèmes expressionnistes et ceux des premiers maîtres de l'abstraction procèdent nettement de ce langage qu'ils veulent dépasser et renouveler, chacun à sa manière. Il faudra la "contre-révolution" de Staline et les deux vagues successives des deux conflits mondiaux pour briser ces individualités outrancières en
quête d'universalité et reverser l'artiste dans son propre silence.

Cet hyper-romantisme m'a emporté, enivré que j'étais par la lyrique de Berg. Sans chercher plus loin, la vague a, un jour, touché un rivage. Des années écoulées sans que cette fascination pour l'oeuvre faiblisse ou ne fane. Bien au contraire, le désir est né de rencontrer la Suite Lyrique autrement, par un chemin différent, pour aimer comprendre et reconstruire une vision secrète. Non plus dans l'écoute pure et intuitive, mais dans une étude plus réfléchie et approfondie du texte.

Un calme qui s'est avéré complètement illusoire. La Suite Lyrique  n'avait pas fini de distiller son venin. La passion secrète qui trame l'oeuvre fut la seconde étape du parcours avant d'entrer pas à pas dans les arcanes d'une écriture dense et touffue.

Que penser d'un secret dévoilé par l'agencement des sons et imperceptible à l'auditeur autrement que par le recours à une autre démarche, biographique, c'est-à-dire inquisitrice, avec tout ce que cela comporte de désagréable...?

Et pourtant, le sentier perdu tracé par Berg devint source d'émerveillement, et vecteur d'une nouvelle dimension, offerte par une musique qui se veut peut-être tout simplement... sincère... et impudique dans le sens profond d'un don d'artiste. Et voilà que rôdent encore les ombres de la psychanalyse et celles d'une époque où la beauté est folie rédemptrice.

Ainsi l'art dévoile ce que la vie cherche à cacher.

La découverte du cryptage de Berg fut la réponse tant cherchée il y a longtemps par un adolescent surpris d'entendre sans comprendre. Pourquoi la musique portait si fortement droit au coeur un récit muet, qui se passait si bien de mots ? Quelle alchimie a fait que dès la première écoute l'auditeur se sent aussitôt complice d'un drame sous-jacent, héritier innocent soudainement tiré par la manche et jeté dans le chaos d'une vie ? A qui cette vie là ?

Enfin, le mystère aurait pu s'arrêter là, par ce brusque retour dans le souvenir. Mais il fallait entrer plus avant dans le monde de la Suite et pénétrer non sans crainte dans les forges du créateur. De prime abord un texte musical hermétique tissé par un réseau de correspondances qui se perdent à l'infini, ce qu'Adorno appelle la transition infime. Une toile d'où rien ne sort gratuitement, ou presque... Car le génie de Berg sait jouer avec le hasard ; une sorte de hasard objectif à la manière des surréalistes français.



Après l'écoute première, après le secret révélé, la suite du voyage risquait d'être périlleuse. Il fallait avancer avec un tel bagage, que le risque de se trouver enserré dans un entrelacs de sous-entendus, de programmes cachés, tant les liens avec le monde vécu étaient grand, amènerait forcément l'analyste à chercher hors de la musique elle-même le ressort à toute idée sonore.

Or Berg, resté toujours fidèle à la tradition allemande, et viennoise, a construit une oeuvre qui se nourrit de ses propres lois et se suffit à elle-même. De fait, les récits, intimement imbriqués, coexistent et forment des strates de lecture autonomes et en regards les uns des autres ; d'une certaine manière, en miroir...

La musique pure est au contraire une préoccupation majeure de notre compositeur et sa démarche se garde bien de faire retenir la structure interne par les seuls contingences d'une pensée extramusicale. La dramaturgie prend son essor dans la conduite intérieure du texte musical et l'on peut aller jusqu'à affirmer que le drame lui-même, son action et donc sa face visible, germe dans le terreau de l'architecture sonore. En effet, tout le travail d'écriture de Berg, de la Sonate opus 1 jusqu'à Lulu et le Concerto pour violon, tourne autour d'une "mise en drame" des sons. Ceci explique son aisance à maîtriser des genres aussi divers que le quatuor, le Lied ou l'opéra.

En adoptant dans la Suite lyrique les lois rigoureuses du dodécaphonisme, Berg, une fois de plus, en détourne d'une certaine manière l'usage afin de faire de ce procédé d'écriture un outil expressif supplémentaire. Au lieu de considérer le langage de ses prédécesseurs comme caduc, il intègre la nouveauté dans une conception beaucoup plus large de l'esthétique musicale.

Pourquoi se priver du matériau pluri-séculaire qui a généré tant de chefs-d'oeuvre ? L'apparente contradiction entre tonalité et atonalité puis dodécaphonisme n'a pas lieu d'être lorsque le geste musical est subordonné à un message humainement plus signifiant. La conception artistique de Berg, héritière encore pour une grande part des idées romantiques, dénie au formalisme toute autorité sur le fondement du propos. En d'autres termes, consonances et dissonances s'entrechoquent, relation de quinte et atonalité se mêlent, accords rejoignent agrégats, rigueur dodécaphoniste s'accommode d'éléments subversifs, et ainsi de suite. Pourvu que ce chaos, régit par la seule loi de la relation, ne s'écarte pas de son objectif immanent.

Cependant, la lecture de la partition de la Suite Lyrique ouvre une fois de plus le chemin d'une nouvelle curiosité. Et dans cette lente exploration, le présent ouvrage d'étude en forme d'essai ne se veut qu'un jalon. 



L'idée n'est pas de commenter les mécanismes multiples de l'écriture bergienne sous une forme par trop technique qui finalement, pourrait égarer le lecteur. Car si la science de Berg est admirable, sa sensibilité, son art, ne sauraient rester cantonnés à un maîtrise inouïe de l'écriture et c'est peut-être "entre les lignes" qu'il faut voir la plus grande marque de son génie... Substituer l'analyse à la partition serait présomptueux, l'étude évitera ainsi de suivre linéairement les traces de l'agencement sonore au profit d'un regard transversal et synthétique.

La présente démarche consiste donc à mener une réflexion assez large pour englober les diverses et nombreuses questions posées par cette musique en regard de son époque, de son héritage, non seulement musical mais aussi littéraire et pictural, de sa finalité, esthétique d'une part et expressive, humaine, d'autre part, ou encore en regard de ces sons reliés entre eux par des éléments quasi-imperceptibles si bien que l'univers sonore de Berg, en suivant toujours Adorno (élève, ami intime de Berg, pianiste, compositeur et philosophe), semble interconnecté de manière métaphysique, voire, nous aimerions dire, quantique.

C'est à tort que Berg fut déconsidéré aussi bien par les esprits conservateurs de son temps que par les générations avant-gardistes de l'après-guerre qui ne lui pardonnèrent pas ses emprunts à la tradition viennoise et à un héritage que l'on a trop vite tenu, dans la seconde moitié du XXe siècle, comme passéiste. Berg lui-même s'inquiéta très vite de son succès ( en témoigne son désarroi, après la première de Wozzeck, le 14 décembre 1925 ) et cette attitude paradoxale aurait de quoi surprendre si l'on oublie les échecs précédents du trio viennois, et l'opinion éminemment romantique selon laquelle toute grande oeuvre se doit d'être incomprise de son temps.

Pourtant, c'est bien le génie charismatique d'un Berg qui fera voler en éclat ces idées mystificatrices. Mais comment et par quels arcanes ? 

Laissons-là les questions pour l'instant, puisque dans ce travail, nous le verrons, elles surgiront de manière imprévue, au détour de telle ou telle réponse...

Le lecteur se verra au fil de ces pages entraîné progressivement dans les méandres de l'écriture de la Suite lyrique par une ordonnance sans doute inhabituelle. Au fil des pages on trouvera des analyses détaillées, des considérations historiques, des réflexions, etc. Ceci d'une part dans l'intention de rester lisible à tout un chacun, en variant le propos, et de réserver la plus grande part de ce travail à la présentation de l'oeuvre sous la forme d'une réflexion personnelle, issue de l'étude du texte et de la vie du compositeur. Et d'autre part, de présenter la synthèse de nombreuses recherches effectuées sur Berg, dans le but de mettre à jour les lignes marquantes de sa conception musicale et d'aider le lecteur à se situer par rapport à une partition très complexe.



Pour terminer ce préambule, précisons que le choix d'une approche sous une forme littéraire porte en soi la volonté première de partager une passion personnelle pour la musique d'Alban Berg et dans un second temps, qui en est le conséquent, le souhait d'avoir une attitude didactique aussi claire que possible ; même si certaines difficultés analytiques sont incontournables. Raison pour laquelle le courant du propos sera sinueux et évitera, autant que faire se peut, les longueurs techniques. Précisons que les analyses diverses, indispensables, forment le cadre de la réflexion et sont l'encrage des différentes digressions qui en découlent.

Un travail d'investigation dans l'espoir d'inviter le lecteur à aimer la Suite lyrique autrement, et à vouloir réentendre une musique si riche, si touffue, que l'on est bien loin, heureusement pour l'art, d'avoir trouvé réponse à tous ses mystères.



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